En mars 2019, des internautes créent un compte Twitter pour dénoncer les harceleurs sexuels présents sur la plateforme. Avec plus de 4 450 abonnés au 20 mai 2019, “Balance ta dick pic” recense entre une quinzaine et une vingtaine de témoignages par semaine.
Tout est parti d’un gros ras-le-bol. « Beaucoup de femmes sont victimes d’envois de photos de pénis, sur les réseaux sociaux et sur Internet de manière générale, mais très peu en parlent. Nous avons pris l’habitude d’effacer ce genre de messages. Pourtant, même si c’est répandu, ça n’en reste pas moins illégal », rappellent les internautes présents derrière le compte @DickpicTa. Un profil créé pour exposer les harceleurs de Twitter.
Parmi les 12-15 ans, une fille sur six a déjà été confrontée à des cyberviolences à caractère sexuel. Ces messages comportent des photos ou des vidéos intimes, comme le rapportait en 2016 une étude portée par le centre Hubertine Auclert. Un harcèlement trop souvent passé sous silence. Le compte @DickpicTa offre une oreille attentive aux victimes. Elles peuvent ainsi exposer les actes des harceleurs à la vue de tous.
« On a déjà essayé d’éduquer. On a essayé de porter plainte, mais même pour les viols, les plaintes n’aboutissent que rarement et la personne est rarement condamnée. Donc maintenant, on affiche. »
Le collectif présent derrière le compte “Balance ta dick pic” sur Twitter
Le compte poste alors une capture d’écran envoyée par la victime. Un post accompagné par un commentaire sarcastique ou un rappel à la loi. En effet, la loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes a été publiée le 3 août 2018 au Journal officiel. Elle succède à l’article 222-33-2-2 du Code pénal, qui, jusqu’à présent, sanctionnait “le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale”.
Quand une femme te dit qu’elle n’est pas intéressée, pourquoi tu forces @comptepersso garde la dans ton pantalon. pic.twitter.com/dR1R3Tq6AW
— Balance ta dick pic (@DickpicTa) April 25, 2019
Ce type de message cible prinicipalement les femmes montrant leur visage sur leur photo de profil Twitter. Désormais, le harcèlement est censé être lui aussi puni sur des supports numériques ou électriques, quand il est réalisé en groupe contre une personne. Comprenez un raid, aux motivations sexuelles ou sexistes. Dans ce cas, le moindre message est susceptible de faire écoper les harceleurs d’une sanction pénale. Celle-ci est alors de deux ans de prison maximum et 30 000 euros d’amende.
En cas de circonstances aggravantes (victime vulnérable —si âgée de moins de 15 ans—, handicapée, malade ou enceinte), les sanctions sont plus lourdes. Elles peuvent atteindre trois ans de prison et 45 000 euros d’amende.
« Les harceleurs font profil bas » une fois exposés
Néanmoins, rien de concret n’est encore fait pour lutter spécifiquement contre ces démarches individuelles et, en apparence, cachées. Ce tribunal public faire grincer quelques dents, mais aux grands maux les grands remèdes. Une fois les captures d’écran des messages incriminés postées, « les harceleurs font profil bas ». Et concernant les victimes, « nous n’avons pas eu vent de suites données pour le moment (comme des dépôts de plainte, par exemple), mais notre compte est encore très jeune ! »
Depuis 2017 et le hashtag #Balancetonporc, de nombreuses mobilisations du genre ont lieu sur Twitter. « Un jour peut-être, ça changera… », espère une certaine chanteuse. On croise les doigts Angèle, même ceux des pieds, parce que ça devient vraiment usant.
Photo de couverture : DR
Texte : Mélanie DOMERGUE
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